dimanche 15 mars 2009

Jeunesse et violence: Symptôme d’une société malade

Raid commando au paint-ball à l’Athénée Jules Destrée à Marcinelle, saccage à l’Athénée royal d’Alleur par une quinzaine de jeunes, agression de professeur à l’arme blanche en pleine cour à l’Institut Don Bosco à Ghlin,... Ces derniers temps, la presse a rapporté pas mal d’incidents violents liés au milieu scolaire ou aux jeunes. Quelles réponses apporter à ces problèmes qui semblent ne faire que croître? La répression est-elle la seule solution?


Par Alain (Namur)


De tels actes ne peuvent être tolérés; vivre en sécurité est un droit inaliénable pour chacun. C’est d’autant plus vrai à l’école, un lieu d’apprentissage qui doit être un endroit sécurisant afin d’offrir les meilleurs conditions d’instruction. Il faut donc sanctionner de manière ferme les auteurs de ces méfaits. Mais quelle sanction au juste? Enfermer les mineurs délinquants en prison? Augmenter le nombre de policiers dans les rues? Développer les méthodes de surveillance et de contrôle au mépris des libertés, avec les risques réels de dérapage? Et jusqu’où?


La violence doit être considérée dans un cadre plus général. Outre les actes de violence perpétrés contre des biens ou des personnes, il y a d’autres formes de violence qui témoignent du profond malaise omniprésent dans la société. Ainsi, le suicide est la seconde cause de décès après les accidents de voiture parmi les jeunes entre 15 et 25 ans. Les échappatoires comme la consommation problématique de produits psychotropes (alcool et drogues) sont autant de symptômes qui illustrent que quelque chose ne va plus dans notre société. Une enquête menée par HBSC (Health Behaviour in School-aged Children) en 2006 dans notre pays nous apprend que 18,1% des jeunes entre 12 et 14 ans consomment au moins 1 produit psychotrope!


Comment pareille situation est-elle possible ? Lorsqu’on sait que 15% de la population vit sous le seuil officiel de pauvreté (860 euros par mois pour un isolé et 1805 euros pour un ménage de deux adultes et deux enfants), on ne peut que mettre en relation la violence sociale du système et la violence physique ou morale qui se manifeste dans la société. Les produits naturels du système capitaliste sont l’inégalité et la misère sociale, qui ont des conséquences sur les individus et leurs relations les uns avec les autres. Comment s’étonner que tant de jeunes se sentent sans perspective d’avenir ?


De plus, l’institution scolaire est fortement sélective et inégalitaire avec une pratique de redoublement et de réorientation qui s’applique en dépit du désir du jeune et des circonstances qui l’entourent. Au vu du surpeuplement des classes (combien de milliers d’enseignants ont-ils perdu leur emploi suite aux ‘réformes’ de Di Rupo et d’Onkelinx dans les années ’90 ?) et du manque de moyens dans l’enseignement, c’est une situation difficile à éviter. Résultat, l’école n’est pas vue par de nombreux jeunes comme un moyen d’épanouissement, et un profond ressentiment est éprouvé contre le système scolaire et ceux qui y travaillent, une colère se développe contre l’image dégradée collée sans ménagement sur l’élève en situation d’échec. Savoir qu’un élève sur trois sort sans diplôme de l’enseignement secondaire supérieur devrait faire réfléchir sur notre enseignement... Mais si les premières victimes de se système sont les enfants issus des couches populaires - les premiers à subir le redoublement et la réorientation vers des filières techniques ou professionnelles - le malaise touche l’ensemble de la jeunesse.


Car si l’enseignement manque de moyens pour former la jeunesse, un autre secteur dispose de milliards pour ce même objectif, mais dans une direction bien moins louable. La publicité et les médias de masse en général cherchent à influencer fortement les comportements, de la jeunesse en particulier, en recherche d’identification. Alors que tout semble virtuellement à portée, beaucoup de gens sont exclus de la consommation. Une énorme frustration peut ainsi se développer et se manifester entre autres par la violence, la délinquance (vol, racket,…). Cela peut avoir des conséquences extrêmes comme le meurtre de Joe Van Hoolsbeek pour le vol d’un lecteur MP3.


La société capitaliste et la publicité incitent à la consommation immédiate, à l’achat pulsionnel, c’est la culture du « tout et tout de suite », qui a aussi un impact sur la sexualité et l’image de la femme. Les médias véhiculent à loisir une vision de la femme comme objet de désir et aussi comme ‘récompense’ de la réussite sociale d’un homme. La société actuelle est hyper-sexualisée à des fins bassement mercantiles avec de multiples conséquences, dont le fait qu’il y a en Belgique un peu plus d’un viol par semaine dans les écoles.


Il faut lutter contre toutes les formes de violence et d’insécurité. Mais cela commence par la violence et l’insécurité sociale. Alors que des milliers de travailleurs perdent leur emploi partout dans le pays, les allocations sociales sont toujours sous le seuil de pauvreté.


Il faut un mouvement de lutte en faveur du maintien et de l’amélioration de nos emplois et de nos conditions de vie.


Il faut mettre fin à la sélection et à l’inégalité dans l’enseignement à tous les niveaux en y injectant massivement des moyens publics et en donnat plus d’accès à la culture; cela permettra de sortir de l’impasse et de la bêtise de la ‘culture’ publicitaire.